Mounira Bouzid El Alami, un souffle nouveau pour les enfants de Tanger

Vous connaissez peut-être Mounira Bouzid El Alami. Cette grande dame a donné un nouveau souffle aux enfants de la ville de Tanger, avec le développement du Centre culturel d’initiatives citoyennes, association désormais appelée Darna, connue de tous les marocains.

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Des débuts de vie où la curiosité est reine

Mounira grandit dans la campagne autour de Marrakech, dans un cadre bucolique non sans similarités avec La Petite Fille dans la Prairie, sans subir la pression du temps, entourée de 5 ânes, 1 chèvre, 2 moutons et 2 vaches.

La seule exigence dans la famille était celle de l’excellence à l’école : à la maison c’est Voltaire, Montesquieu, Rousseau, la France des Lumières pour effacer celle des colons. C’est une élève brillante, adorée de ses professeurs et détestée des « gens de la discipline », qui la voient comme une fauteuse de troubles, qui questionne tous les acquis autour d’elle.

Ce seront ses professeurs qui la pousseront vers des études en France, d’abord au lycée Fénelon, puis à l’Ecole Normale Supérieure de Paris. Elle étudie la psychanalyse à la fac de Nanterre, avec Alain Touraine comme directeur de thèse ; et c’est un poste d’observation privilégié pour étudier les évolutions de la société française, les familles de marocains immigrés parquées dans des bidonvilles, mai 68 s’annonçant bientôt…

C’est le mal du pays qui la rappelle au Maroc, l’envie de servir son pays natal. Elle ouvre un cabinet de psychothérapeute, mais l’impression persiste de ne pas être utile à la classe sociale la plus en difficulté. C’est là qu’elle se lance à corps perdu dans avec le développement du Centre culturel d’initiatives citoyennes, qui deviendra par la suite l’association Darna (notre maison en arabe).

Darna, l’œuvre d’une vie

Darna, c’est un ensemble de maisons et de centres qui accueillent les enfants des rues de Tanger pour leur offrir une deuxième chance, et éviter qu’ils ne voient comme seule solution à leur désespoir la traversée du détroit de Gibraltar.

Darna va donc s’adresser aux jeunes filles et jeunes garçons. Pour les 8-9 ans, il va s’agir de les accompagner dans leur scolarisation et leur proposer les activités d’enfants auxquelles ils ne peuvent prétendre chez eux. Les 12-13 ans vont, eux, avoir accès des formations professionnelles qualifiantes (menuiserie, boulangerie, couture…), qui vont leur ouvrir les portes des entreprises du réseau Darna. Le but étant de permettre aux enfants de devenir des acteurs économiques à part entière, avec une place dans la société et des compétences spécifiques.

Darna se positionne donc comme une entité qui vient compenser le déficit de l’école publique au Maroc au bénéfice de ceux qui n’ont pas les moyens d’adhérer à l’école privée, l’idée étant de protéger la richesse du pays, qui est son écosystème et la diversité de son capital humain.

Les femmes dans tout ça

Quand on lui parle de féminisme, Mounira répond qu’elle est pour la mixité. Depuis toute petite, son père répétait qu’il voulait que ses filles soient libres. C’est le genre de messages qui ne tombe pas dans l’oreille d’une sourde. Libertaire convaincue, elle joue au foot avec les garçons à 12 ans, puis à son tour élève ses enfants comme elle l’entend. Ses débuts dans la vie vont forger un caractère et une confiance en soi qui l’accompagnent encore aujourd’hui.

Et justement, Mounira ne prêche que par 3 mots : crédibilité, liberté et exemplarité. En assumant ses choix, à force d’honnêteté et de patience, elle ne se compromet jamais mais fait des compromis, l’important étant de quoi qu’il arrive, garder sa liberté.

Elle prône comme seules armes la connaissance et la curiosité : elles lui permettent de toujours élever le niveau, toujours ambitionner plus, le premier pas étant d’avoir une volonté et une vision claire de où nous voulons aller.

La suite ? « Je devrais avoir une deuxième vie ». Son œuvre restera inachevée. Cependant c’est par la transmission que se perpétuera son projet : en laissant des archives, des traces qui se veulent des référentiels pour les générations futures, Mounira donne toutes les cartes à ceux qui reprendront le flambeau.

Pour aller plus loin

Le site internet de l’association : http://www.darnamaroc.com/

Une vidéo présentant les différents foyers et l’approche pédagogique de Darna


Un article détaillant la situation des enfants des rues de Tanger

Le centre Darna à Tanger
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